2ème édition du Prix du
Livre Insulaire (Ouessant 2000)
ouvrage
sélectionné |
Madagascar,
l'île essentielle : étude d'anthropologie
culturelle
/ Didier Mauro et Emeline Raholiarisoa ; préface de
Jacques
Lombard ; sept dessins originaux de Bernard Claverie. -
Xonrupt-Longemer : Anako, 2000. -
318 p.-[16] p. de
pl. : ill. ; 24 cm. - (Grands
témoins).
ISBN
2-907754-55-6
|
|
Île
aux syllabes de flamme
Madagascar !
☐
Jacques-Félicien Rabemananjara, O
liberté — extrait cité
p. 190 |
NOTE DE L'ÉDITEUR
: Madagascar
l'île essentielle est la produit d'une
décennie de recherches et de voyages. Ce livre retrace un
cheminement à la rencontre du pays profond (huit Malgaches
sur dix vivent en milieu rural).
Il propose une approche inédite de
cette très belle île entourée
d'archipels de rêve et bordée de lagons tandis que
la jungle, le bush, la savane, les montagnes et les rizières
en terrasses se succèdent à
l'intérieur des terres.
Trajet dans le temps et dans l'espace, il nous
fait découvrir l'histoire de cette étonnante
civilisation née sur la quatrième île
du monde, sa cosmogonie fondée sur la place de l'individu
entre l'ascendance — les
ancêtres — et la descendance dans le cycle
de la vie. Il nous rapporte des récits de paysans et de
poètes, d'étudiants et de pêcheurs.
Car, curieusement, la culture, la langue, la
philosophie du peuple malgache — pourtant tellement
riches — sont bien moins connues que les
espiègles lémuriens et la flore d'exception de ce
grand pays considéré comme un sanctuaire de la
nature.
Enfin, ce livre procède d'une
démarche inhabituelle : Madagascar y est vue de
l'intérieur. Recherche, parcours et
écriture ont associé, pour la première
fois, une artiste malgache et un écrivain
européen.
|
EXTRAIT |
Nation
métisse, Madagascar l'est d'abord par les
mélanges
infinis que l'on peut constater au cœur des familles. Du VIe
siècle jusqu'à ce jour, nos ancêtres
ont
sillonné l'île continent en d'incessants parcours.
Ceux du
Sud sont allés dans l'Ouest, ceux de l'Est ont
longé la
côte vers le nord et le sud, ceux de l'Ouest se sont
dirigés vers le nord, le sud, l'est et le centre, et ceux du
Centre se sont installés partout … Il en
résulte un profond métissage entre toutes les
régions. Le tribalisme est impensable sur la Grande
Île.
Et pourtant … les stratéges de la
colonisation se
sont employés à diviser « les
côtiers » et « ceux des
hauts
plateaux », les Merina et les
autres … tandis
que plus récemment certains politiciens tentaient de dresser
« ceux à cheveux
raides » contre
« ceux à cheveux
crêpus » pour
essayer de faire oublier que la ligne de partage, à
Madagascar,
n'est en aucun cas ethnique, mais sociale. Il y a, d'un
côté, l'immense majorité de la
population rurale et
citadine qui vit dans la pauvreté, et, de l'autre, une toute
petite élite politicienne et affairiste qui a pris le relais
des
colons, une classe dirigeante sans scrupules qui pille le pays depuis
l'indépendance. S'il doit y avoir une fracture, c'est d'une
lutte de classes qu'il s'agit.
Quant
à diviser la population pour susciter des affrontements
ethniques, c'est peine perdue. Dans ma famille, tout le monde est
mélangé, certains ont les cheveux raides et
d'autres les
cheveux crêpus. Entre les deux, il existe un
éventail de
textures capillaires que nous remarquons, nous, les filles, en nous
coiffant mutuellement, mais auxquelles personne ne pense. Ma
grand-mère paternelle était indiscutablement
asiatique et
ressemblait à une Indonésienne. Mon
grand-père,
lui, avait tout du guerrier bantou. Moi j'ai la peau noire, les cheveux
ni raides ni crêpus, les yeux en amande. Je danse le kwassa-kwassa
comme
les Africaines, et dans ma tête subsistent des modes de
pensée dont je sais, maintenant que j'ai
étudié et
rencontré d'autres peuples, qu'ils me viennent de mes
lointains
ancêtres d'Extrême-Orient, d'Indonésie,
de Malaisie,
d'Océanie. Il en est ainsi dans toutes les familles
malgaches.
☐ Emeline Raholiarisoa, Les
familles métisses font l'unité nationale, pp. 135-136 |
|
COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- Didier Mauro et Emeline Raholiarisoa,
« Madagascar,
l'île Mère »,
Xonrupt-Longemer : Anako, 2000
- Didier
Mauro et Emeline Raholiarisoa, « Madagascar, parole
d'ancêtre merina : amour et rébellion en
Imerina », Xonrupt-Longemer : Anako, 2000
|
- Didier
Mauro, « Un parfum de vanille à La Désirade », Paris : L'Harmattan, 2021
- Didier
Mauro, « Veloma Madagascar : nosy malalako
— Adieu Madagascar : demeure
vivante, île mon amour », Paris :
L'Harmattan, 2017
- Didier Mauro, « Testament
anthropologique rebelle de Madagascar »,
L'Harmattan, 2016
- Didier Mauro,
« Madagascar »,
Gérardmer : Pages du monde (Guides culturel du
monde), 2009
- Didier
Mauro, « Madagascar
l'opéra du peuple : anthologie d'un fait social
total,
l'art Hira Gasy entre tradition et rébellion »,
Paris : Karthala (Hommes
et sociétés),
2001
|
|
|
mise-à-jour : 26 avril 2021 |
|
|
|