NOTE DE L'ÉDITEUR
: Quel entendement du monde et de la société se fait jour
dans ces rumeurs publiques ou privées que nous appelons
« mythes » et auxquelles les Kanak de Maré
accordent le statut de pierres ? Cet essait donne à
entendre les récits des gens de cette île pour tenter de
goûter avec eux, en dévoilant les potentialités
poétiques de leur langue, le tour, le style et la teneur de
l'argument. On ne peut manquer, en effet, d'admirer le jeu formel des
combinaisons lexicales qui structurent la fiction en différents
niveaux de discours, ou de s'étonner encore des inventions
anagrammatiques. Point de ruse rhétorique chez le
« diseur de pierres » — qu'une anthopologie
fonctionnaliste prétend roué et arc-bouté dans une
quête incessante d'avantages politiques —, point de ruse
sinon celle qui provisionne l'auditoire en volupté narrative.
La langue rythme alors l'exposé critique des affaires humaines
auxquelles sont appliquées les propriétés logiques
des classifications animales et végétales. Dans les
termes du bestiaire insulaire ou de la botanique indigène, se
déploie une spéculation rigoureuse sur les règles
et l'histoire des échanges matrimoniaux, sur les contradictions
inhérentes à leur renouvellement. Les repreneurs de
mythes, personnages de haut statut social instruits des conflits dont
l'histoire est cousue, prétendent ainsi raison garder : ils
reconsidèrent à l'aune littérale de la
règle les relations problématiques qui marquèrent
l'histoire de leur groupe.
Charles Illouz,
maître de conférence en ethnologie, mène des
recherches sur les sociétés mélanésiennes
des îles Loyauté, notamment à Maré où
il a résidé plusieurs années. Il appartient
à l'équipe SEAMAN, composante « Espace
Nouveaux Mondes », de l'Université de La Rochelle.
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE
- Charles Illouz et Thérèse Tréfeu, « Sources du Pacifique insulaire : lieux de recherche et d'information scientifique », Paris : Karthala, 2004
- Charles
Illouz, « La parole ou la vie : valeur et dette en
Mélanésie », Rennes : Presses
universitaires de Rennes (Le Sens social), 2010
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