Graziella / Alphonse de
Lamartine ; éd. par Jean-Michel Gardair. -
Paris : Gallimard, 1979. - 265 p. ;
18 cm. - (Folio classique, 1085).
ISBN 2-07-037085-2
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NOTE
DE L'ÉDITEUR : Il
a vingt ans, il ne fait rien et, pour mettre fin à une
idylle qui déplaît à sa famille,
celle-ci l'expédie en Italie. Lamartine visite Florence,
séjourne à Rome, arrive à Naples
où, après une promenade en barque qui met sa vie
en péril, il rencontre la fille d'un pêcheur
— c'est Graziella — et c'est une des histoires
d'amour les plus belles et les plus touchantes que l'on ait jamais
écrites. Une histoire très brève
aussi : Graziella ne survivra pas longtemps au retour en
France de son ami.
Il y a deux personnages dans
Graziella : Graziella elle-même et l'Italie. Non pas
l'Italie de Stendhal, des “ diva ”, des Sanseverina, des
archevêques amoureux. Mais l'Italie des paysans, des
pêcheurs, qui, aux rives d'Ischia et de Procida, vivent parmi
leurs jardins et leurs vignes aussi simplement qu'aux plus beaux jours
du monde antique.
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NICOLE
COURTINAT
: […]
L'île, dans Graziella,
n'est […] pas seulement cet espace euphorique auquel on
pense spontanément lorsqu'on évoque le roman.
Tantôt l'île est perçue comme le lieu
par excellence de la félicité, où se
réalise l'osmose miraculeuse du moi et du monde, et
où affleure la pureté des temps originels.
Tantôt elle revêt les teintes sombres de la mer et
du deuil, et se mue en espace tragique. De surcroît,
l'île est bien plus que le décor des amours de
vacances du poète. Dans ce roman de
l'étrangeté, de la singularité, de la
solitude du moi, la thématique insulaire sert
d'élément structurel, et invite plus que jamais
à relire cette apparente “ bluette ” comme un
“ roman de la
déchirure ”. Roman de l'île, Graziella
l'est pleinement, tant par ses paysages, ses
personnages, que par ses résonnances symboliques.
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« Graziella
de Lamartine, ou le double visage de
l'île », in L'insularité,
études rassemblées par Mustapha Trabelsi,
Clermont-Ferrand : Presses universitaires Blaise Pascal, 2005
(p. 343)
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EXTRAIT |
A notre réveil, le ciel
était balayé comme un cristal poli, la mer
foncée et tigrée d'écume comme si
l'eau eût sué de vitesse et de lassitude.
Mais le vent, plus furieux, mugissait toujours. La
poussière blanche que les vagues accumulaient sur la pointe
du cap Misène s'élevait encore plus haut que la
veille. Elle noyait toute la côte de Cumes dans un flux et un
reflux de brume lumineuse qui ne cessait de monter et de retomber. On
n'apercevait aucune voile sur le golfe de Gaète ni sur celui
de Baia. Les hirondelles de mer fouettaient l'écume de leurs
ailes blanches, seul oiseau qui ait son élément
dans la tempête et qui crie de joie pendant les naufrages,
comme ces habitants maudits de la baie des
Trépassés qui attendent leur proie des navires en
perdition.
Nous éprouvions, sans nous le dire, une
joie secrète d'être ainsi emprisonnés
par le gros temps dans la maison et dans la vigne du batelier. Cela
nous donnait le temps de savourer notre situation et de jouir du
bonheur de cette pauvre famille à laquelle nous nous
attachions comme des enfants.
Le vent et la grosse mer nous y retinrent neuf
jours entiers. Nous aurions désiré, moi surtout,
que la tempête ne finît jamais et qu'une
nécessité involontaire et fatale nous
fît passer des années où nous nous
trouvions si captifs et si heureux.
☐ Chapitre premier, XXIII
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Graziella »,
in Les Confidences, Paris : Perrotin, 1849
- « Graziella »,
Paris : Librairie nouvelle, 1852
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- Abel
Verdier, « Les Amours italiennes de Lamartine,
Graziella et Lena », Paris : La Colombe,
1963
- Jeannine
Guichardet, « La grâce
déchirée : pages-paysages dans Graziella »,
in Un ange passe : Lamartine et le
féminin, textes réunis par Jean-Pierre
Reynaud, Paris : Klincksieck, 1997
- Nicole
Courtinat, « Graziella de
Lamartine, ou le double visage de l'île »,
in L'insularité,
études rassemblées par Mustapha Trabelsi,
Clermont-Ferrand : Presses universitaires Blaise Pascal, 2005
- Àngels
Santa, « Représentation de
l'île dans Graziella
de Lamartine », in
Diana Cooper-Richet et Carlota Vicens-Pujol (dir.), De
l'île réelle à l'île
fantasmée :
voyages, littérature(s) et insularité (XVIIe-XXe
siècles), Paris : Nouveau
monde, 2012
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mise-à-jour :
31 octobre 2012
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