Didier Tronchet

Robinson père & fils

Elytis

Bordeaux
, 2017

bibliothèque insulaire

   
Madagascar
parutions 2017
Robinsons père & fils / Didier Tronchet. - Bordeaux : Elytis, 2017. - 137 p. : ill., carte ; 16 cm.
ISBN 978-2-35639-222-0
Soudain j'étais un traître à ma patrie, ma famille,
à l'économie libérale, l'histoire de mon pays, la civilisation occidentale.

p. 98

NOTE DE L'ÉDITEUR
: Un îlot perdu dans l'océan Indien … Quelques récits de voyageurs, une ou deux photos … Il n'en faut pas plus à l'auteur pour quitter son univers urbain et s'expatrier plusieurs mois sur l'île aux Nattes, au large de Madagascar, quintessence du concept îlien, avec “ la ferme intention de vivre sans les béquilles que la société moderne fait passer pour indispensables ”.
Pourtant, une fois déchiré le voile du fantasme, la réalité rattrape vite le fugitif … À commencer par les réalités personnelles. Partir hors du monde n'est pas partir hors de soi …

Sur cette île sans issue, Didier Tronchet fait l'apprentissage d'une autre vie, non pas en solitaire, mais avec une bombe à retardement devant lui, sur la pirogue : un adolescent, son fils Antoine …
       
Didier Tronchet est né à Béthune en 1958. Il a vécu à Paris, Quito, Madagascar et réside aujourd'hui à Lyon. Auteur de très nombreux ouvrages, allant de la bande dessinée à l'essai, il est aussi scénariste et réalisateur.
EXTRAIT Trois jours après notre arrivée, je pensais avoir compris la physionomie de l'île. Je me suis lancé un peu tard dans la journée à l'assaut de la côte Est. Je pensais facilement retomber sur mes pattes en basculant vers l'ouest, et retour au point de départ. La nuit est tombée plus vite que prévu, avec ses promesses de moustiques impaludés. Le ciel était d'un noir d'encre. On ne pouvait y voir encore que sur la plage, grâce à la teinte plus claire du sable blanc. Mais la marée était haute et les vagues me jetaient sur les arbres en bordure. J'ai cru que les lumières droit devant étaient celles de chez Tity. J'en étais loin. J'ai donc quémandé de l'aide à un restaurant qui est apparu en bord de plage. Le serveur qui m'a reçu finissait son service. Il m'a proposé de le suivre dans la nuit, il avait une minuscule lampe de poche.

Je ne saurais dire le chemin que nous avons emprunté, qui repartait en arrière, puis obliquait à l'intérieur des terres […]. Puis le chemin s'est mis à grimper. […] Etrange parcours sinueux, en aveugle. Des éclats de voix. J'ai senti que frémissait ici une population plus importante. “ Le village ! ” m'a dit mon guide. Il habitait là, mais se proposait de me ramener à bon port. Je n'avais peur que des moustiques nocturnes, les plus dangereux, car j'étais sans protection. Nous avons redescendu une colline toujours dans le noir complet d'où surgissaient maintenant des visages hilares. Mon guide expliquait sans doute que le Blanc s'était perdu. Très drôle. Et au bout d'un temps que je n'ai su estimer — sans doute l'obscurité l'a-t-elle allongé démesurément ? —, j'ai reconnu les lumières de chez Tity. Le groupe électrogène avait démarré depuis longtemps. J'étais inquiet qu'Antoine ne soit inquiet. Pas du tout. Ça l'a fait rire. Qu'on puisse se perdre sur une île de deux kilomètres, quelle blague !


pp. 37-38
COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE
  • Didier Tronchet (scénario et dessin), « Robinsons père & fils », Paris : Delcourt, 2019

mise-à-jour : 29 mars 2021
Didier Tronchet : Robinsons père & fils
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