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EXTRAIT

— Sœur Fidelma ? Vous avez fait bon voyage ?    Le jeune homme s'exprimait d'une voix posée et mesurée. « Courtois, voilà tout », songea Fidelma qui lui adressa un sourire amusé. Ce brusque sourire, à la fois enfantin et insouciant, déconcerta le jeune homme. Sans prononcer un mot, la religieuse lui désigna l'océan d'un geste large.    Sur les flots gris ourlés d'écume de cette fin d'automne, la traversée n'avait pas été un voyage d'agrément. Le vent glacial soufflait en rafales, sifflant dans les côtes découpées par les vagues qui martelaient les falaises. Cette île égarée dans l'océan donnait l'impression qu'un raz-de-marée avait arraché le sommet d'une colline du continent pour le précipiter dans les mers déchaînées. En s'approchant de ses rivages déchiquetés, Fidelma avait eu la vision d'une crête de coq de combat, et elle s'était émerveillée que des êtres humains puissent survivre dans un cadre aussi inhospitalier.    Au cour de leur navigation, le matelot lui avait appris que le nombre d'habitants sur l'île s'élevait à cent soixante, des habitants qui en hiver pouvaient rester isolés pendant des mois car pas même un curragh manœuvré par un habile marin ne serait parvenu à bon port. La population de l'île était étroitement soudée, peu bavarde, et on n'y avait pas recensé de mort suspecte depuis des temps immémoriaux.    Jusqu'à aujourd'hui.    Le jeune homme fronça les sourcils devant le silence de la religieuse.    — Ce n'était pas la peine de vous déranger pour cette affaire, sœur Fidelma. Elle ne présente pas de difficultés particulières.    Fidelma lui jeta un coup d'œil aiguisé.    Il était visiblement mécontent qu'une personne de l'extérieur intervienne dans une affaire qu'il considérait comme relevant de sa juridiction. ☐ Un meurtre miraculeux, pp. 111-112