Une
longue vague porteuse, carnet de bord / Frédéric Jacques
Temple. - Arles : Actes sud, 2016. - 160 p. ;
19 cm. - (Un Endroit où aller). ISBN 978-2-330-06048-0
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| À la vie jusqu'au bout, avant l'atterrage. |
Poète et marin, Frédéric Jacques Temple
était attaché aussi étroitement à sa terre
occitane qu'à sa liberté de vagabond. À la
barre du San Cristobal
écrit-il, “ je ne sais pas qui tient le cap, moi ou mon
ange gardien, ni qui pousse le bateau, toutes voiles dehors, vers le
havre dont nul ne connaît le lieu et le nom ”.
Il
note dans ce carnet de bord tout “ ce qui [l]'instruit et [le]
touche ” ; toujours des rencontres — avec la
faune et la flore, avec êtres (amis)
et lieux, avec les livres.
L'errance semblait promise à
l'éternité mais, presque centenaire,
Frédéric Jacques Temple a été
rattrapé par la “ longue vague porteuse ”. ❙ | Frédéric
Jacques Temple est mort à Aujarques, le 5 août 2020,
à l’âge de 98 ans ; il fut académicien de
Montpellier (Section des Lettres), puis académicien honoraire
— Académie de Montpellier. |
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EXTRAIT |
Mes
îles : Molène, dans la mer d'Iroise. Les lapins y
règnent, non seulement sur la lande sauvage, mais jusque dans
les potagers. À Molène, on se nourrit de homards, comme
ailleurs de pommes de terre. Sur les récifs voisins, des phoques
s'ensoleillent.
Au Cap-Vert : Sana, terre
désolée. Le village multicolore, paisible, accueillant.
Les enfants, propres et joyeux, s'égaillent à la sortie
de l'école, en bel uniforme. À bonne distance
sécuritaire, un hôtel bourré de touristes qui n'en
sortent guère, exhibitionnistes cramoisis, bedonnants, à
panamas et bermudas, fumant cigares, buvant whisky, sous le regard
neutre de serveurs et de maîtres d'hôte en impeccable
tenue. La prochaine fois, loger chez l'indigène.
Nantucket, qui survit à la puanteur des baleines et cachalots, aux naufrages, à la tragédie de l'Essex (Le Péquod d'Herman
Melville), n'est plus qu'un musée. On peut y rêver
pourtant quand les touristes dorment. J'y suis venu de New Bedford,
dans le froid de décembre, après avoir marchandé
mon passage avec deux marins, dans le Spouter Inn où
dînait quelque Ishmaël.
La Corse, un des plus beaux
paysages du monde, pour sa clarté, ses opaques forêts que
survolent les derniers gypaètes, ses lumineuses rades, avec son
peuple plusieurs fois millénaires. Issu de la mer,
accroché à ses falaises, enfoui dans ses secrètes
montagnes, il n'en finit pas de célébrer les
mystères de ses drames, avec sa belle et orgueilleuse
volonté d'être le maître de son île.
☐ pp. 101-102 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE |
- « Par le sextant du soleil [suivi de] Sirventès », Paris : Bruno Doucey (Soleil noir), 2020
- « Divagabondages », Arles : Actes sud, 2018
- « Dans l'aire des vents », Paris : Bruno Doucey, 2017
- « Phares, balises & feux brefs [suivi de] Périples », Paris : Bruno Doucey, 2012
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- Lawrence Durrell et Henry Miller,
« Correspondance 1935-1980 » trad. de l'anglais
par Bernard Willerval et Frédéric Jacques Temple,
Paris : Buchet Chastel, 2004
- « Poètes
des îles » textes réunis par
Frédéric Jacques Temple, Marseille : Sud (Sud,
108), 1994
- Cilette Ofaire,
« L'Ismé » préface de
Frédéric Jacques Temple, Arles : Actes sud (Babel,
24), 1990
- Lawrence Durrell,
« Un Faust irlandais » trad. de l'anglais par
Frédéric Jacques Temple, Paris : Gallimard
(Théâtre du monde entier), 1974
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mise-à-jour : 13 juillet 2021 |
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