SANJAY SUBRAHMANYAM : En écrivant ce livre, qui se présente sous la forme d'un travail de synthèse et d'explication en plusieurs chapitres bien plutôt que comme une étude encyclopédique, je n'ai pas cherché à reprendre les guerres coloniales. Pas plus que je n'ai cherché à faire une incursion dans les voies innombrables de l'interaction culturelle entre les Portugais et l'Asie. Au lieu de cela, j'ai rédigé une histoire politique et économique, en cherchant à situer la présence portugaise, entre le Cap de Bonne-Espérance et le Japon aux XVI^e et XVII^e siècles, sur deux plans qui se recoupent. L'implantation portugaise dans les contextes asiatiques et d'Afrique de l'Est sera reprécisée ; et dans le même temps, on la situera dans le contexte européen.

L'ouvrage prend ses sources non seulement dans le corpus de la documentation portugaise (qui ne nous parle que d'une seule et même voix), mais aussi dans les récits de voyage des autres Européens, dans les journaux des Compagnies de commerce du XVII^e siècle, dans les mémoires et les correspondances d'Italiens et d'Allemands qui résidaient en Asie portugaise. On peut s'appuyer également sur le matériel documentaire asiatique et africain, soit écrit, soit préservé sous forme de traditions orales. De fait, cet ouvrage se veut une contribution au débat sur le sujet plus vaste de la nature de l'édification de l'empire européen au début de la période moderne. C'est dans ce contexte-là qu'on abordera la question singulièrement épineuse du degré de continuité et de discontinuité de l'expansion portugaise puis hollandaise et britannique en Asie.