Le poids des
rêves / Samir Bouhadjadj ; avant-propos de Martine Lagneau.
- Nouméa : Madrépores, 2007. - 42 p. ;
17 cm.
ISBN 978-2-9525502-1-5
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Doté d'un nez à faire pâlir Cyrano — un ignoble igname —,
un jeune homme s'est fait opérer pour échapper aux
regards, aussi pesants durant l'enfance à Bourail puis à
Nouméa que plus tard à Montpellier. Mais, passée
l'épreuve du bistouri, rien ne se passe comme
prévu : « la normalité atteinte, je
disparaissais dans la transparence timide de mon existence sans taches
ni caractère ».
« Le poids des rêves » déroule un
long monologue : le narrateur attend ses parents dans le hall d'un
aéroport pour leur présenter son nouveau visage et
cherche à tromper l'angoisse des retrouvailles ; des bribes
d'un passé tortueux et douloureux se heurtent aux incertitudes
de l'avenir.
Les rêves qui ont soutenu l'enfant puis l'adolescent dans son
combat quotidien ne sont plus requis pour affronter la nouvelle vie qui
s'ouvre ; mais le sourire chaleureux du père et de la
mère à la sortie de l'avion laissent entendre qu'une page
est bien tournée.
❙ Originaire
du Maroc, né en Algérie, en 1977, mais n’ayant
jamais pu mettre les pieds dans ces deux pays depuis l’âge
de neuf mois, Samir Bouhadjadj
grandit en France, dans le sud de la Drôme ; la recherche de
racines a toujours porté ce jeune écrivain à jeter
un regard curieux sur le monde qui l’entoure. Passionné
d’écriture et de voyage, il prend ensuite son baluchon
pour sillonner le monde à la recherche de
« l’endroit parcouru des meilleures
ondes » : Canada, Pays-Bas, Pologne,
Australie … jusqu’à ce que sa barque
s’échoue sur les rivages du Caillou. Également
passionné par les mystères, la beauté et les
habitants de la Nouvelle-Calédonie, il songe à s’y
installer définitivement en compagnie de celle qui partage sa
vie, « afin d’y contempler le monde au travers du
fabuleux kaléidoscope culturel et humain qui prend vie à
l’ombre des niaoulis ».
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EXTRAIT |
Quitte
à être différent et mis à l'écart, je
préférais le revendiquer plutôt que d'en souffrir.
Très vite, ce retrait volontaire de la troupe compacte et
intolérante de Bourail me valut toute une tonne de sobriquets
acides et cruels comme seuls les enfants sont capables d'en
dégoter. Face de papaye verte, de perroquet, d'igname,
forcément, espèce de thon, de poney malformé, etc.
L'espace de quelques années, j'étais ainsi devenu le
gardien d'une formidable ménagerie imaginaire que je cachais
dans mon appendice nasal. Mais plutôt que de m'en offusquer
publiquement, je faisais mine de noter les meilleurs dans mon carnet
pour m'en souvenir et j'indiquais à mes assaillants leur manque
d'imagination dès qu'une vieille insulte refaisait surface.
À l'école, mon véritable jardin secret, qui me
permettait d'échapper aux railleries, était de dessiner
ou de rêver à d'autres endroits, d'autres lieux. Les
descriptions des livres de Jules Verne étaient celles qui
m'emmenaient le plus loin.
Dans mes lectures comme dans ma vie, l'ennemi était très
largement supérieur en nombre, mais ma force résidait
dans mon mode de défense élaboré. Seul contre tous
et tous contre moi, c'était ma devise, et elle était
à peine plus paranaoïaque que la réalité.
☐ pp. 14-15 |
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COMPLÉMENT
BIBLIOGRAPHIQUE
- « Le nouveau nez », Nouméa : Bois de jade, 2009
- « Le bal des innocents », Vanves : Éd. du Bout de la rue, 2011
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mise-à-jour : 18 février 2013 |
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