Des morts, des
vivants et des choses : ethnographie d’un village de
pêcheurs au nord de Madagascar / Hélène
Giguère ; préface de Sylvie Poirier. - Sainte Foy
(Québec) : Les Presses de l'université Laval ;
Paris : L'Harmattan, 2006. - 152 p. : ill.,
cartes ; 23 cm. - (InterCultures).
ISBN 2-7637-8324-4 (Presses de l'université Laval) ; 2-296-00096-7 (L'Harmattan)
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SYLVIE POIRIER : […]
Le développement de la pêche crevettière dans la région de la baie d'Ambaro 1
a bouleversé les pratiques et les économies halieutiques
traditionnelles. Les nouvelles opportunités économiques 2
ont quant à elles entraîné l'arrivée massive
dans la région de migrants de différentes ethnies
malgaches, ce qui n'est pas sans occasionner des tensions et des
conflits. Là comme ailleurs, modernité et
développement deviennent, plus souvent qu'autrement, synonyme de
perte d'autonomie, d'inégalités sociales grandissantes,
de monétarisation des rapports sociaux et d'individualisation de
la personne. Les réseaux locaux de solidarité et
d'appartenance sont perturbés et l'état malgache
postcolonial n'a pas pris le relai afin d'assurer une
sécurité sociale pour tous et chacun. On assiste
dès lors à un déficit de confiance dans les
rapports interpersonnels et interethniques, un climat qui non seulement
consolide les pouvoirs de la sorcellerie, mais lui fournit de nouveaux
lieux d'expression. Des morts, des vivants et des choses
nous conduit au « corps » d'une crise
sorcière. Or, ce phénomène, on ne peut plus
contemportain, et loin de se limiter à Madagascar puisqu'il a
été observé dans plusieurs régions du
globe, ne figure pas parmi les préoccupations des marchands de
« modernité » et de rentabilité
économique.
[…]
☐ Préface, pp. 7-8 1. | Au nord-ouest de l'île. | 2. | La crevette fournit 11 % des recettes d'exportation du pays. |
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HÉLÈNE GIGUÈRE : […]
Ce livre comprend quatre chapitres. Le premier chapitre met en contexte
à la fois l'évolution de l'industrie crevettière
dans la baie d'Ambaro, la consolidation du groupe culturel nommé
Antankarana, son organisation politique et la formation d'un village de
pêche confronté à un phénomène majeur
d'immigration. Le second chapitre se concentre sur les formes
traditionnelles de pouvoir, principalement par le culte de possession
nommé tromba qui met
en scène des ancêtres défunts, royaux pour la
plupart, incarnés dans le corps des vivants. La
co-présence de ces deux catégories d'acteurs
(défunts et vivants) se retrouve dans l'ensemble du
mémoire puisque c'est dans leur dialogue que s'accomplit la
destinée des Antankarana et de ceux qui vivent sur leur
territoire. Le troisième chapitre se tourne vers les formes de
la sorcellerie, leurs applications et leur moteur. Y sont alors
présentés quelques exemples démontrant bien que le
développement économique a pour effet de consolider les
pratiques de sorcellerie là où elles
préexistaient. Celles-ci contribuent à représenter
le corps comme étant une arène politique à
l'intérieur de laquelle les rivalités s'affrontent et
à exacerber certaines émotions qui nuisent au
développement d'associations et de concertations au sein d'une
collectivité. Le quatrième chapitre se veut conclusif. Il
aborde des thèmes récurrents liés au
développement maritime : l'exclusion progressive des femmes
des procès de production modernisés, donc non
traditionnels, et l'immigration causée par l'attrait
pécuniaire d'une activité en pleine expansion. L'ensemble
de ce chapitre est enrichi de données théoriques afin de
créer un dialogue entre celles-ci et l'empirie en plus de
permettre la construction d'un discours scientifique sensible et vivant.
[…]
☐ Introduction, p. 15
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❙ | Hélène
Giguère est docteure en anthropologie sociale et ethnologie de
l’École des hautes études en sciences sociales
(Paris) ainsi que de l’Université de Séville. Elle
a réalisé deux recherches postdoctorales au Centre
interuniversitaire d’études sur les lettres, les arts et
les traditions (CELAT) de l’Université Laval. |
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mise-à-jour : 28 janvier 2007 |
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